Grace Emie Kutino nommée Ministre: Une pasteure de 25 ans à la tête du ministère de la Jeunesse
Le 7 août 2025 restera une date marquante dans l’histoire politique de la République démocratique du Congo. Ce jour-là, le président Félix Tshisekedi a nommé Grace Emie Kutino au poste stratégique de Ministre de la Jeunesse et de l’Éveil Patriotique dans le nouveau gouvernement dirigé par la Première ministre Judith Suminwa. À seulement 25 ans, cette jeune femme devient l’une des plus jeunes ministres de l’histoire du pays, prenant la succession de Noëlla Ayeganagato qui a été promue au poste de Vice-Ministre des Affaires étrangères.
Table de Matières sur Grace Emie Kutino nommée Ministre
Un parcours familial tumultueux
Grace Emie Kutino n’est pas une inconnue dans le paysage congolais. Née le 11 mars, selon certaines sources en 2000, à l’hôpital de Ngaliema à Kinshasa, elle est la fille du pasteur controversé Kutino Fernando, figure emblématique et polémique du monde religieux congolais. Son père, fondateur de l’église Armée de Victoire et du mouvement « Sauvons le Congo », a marqué l’histoire récente du pays par son opposition farouche au régime de l’ancien président Joseph Kabila.
L’histoire familiale de Grace est marquée par la persécution politique. En 2008, son père a été emprisonné sous le régime Kabila pour ses activités d’opposition, subissant près d’une décennie de détention et de torture. Cette période sombre a contraint la famille à l’exil, et Grace a grandi principalement en France, une expérience qui a forgé sa personnalité et sa vision du monde.
Sa mère, Bishop Emie Kutino, est également une figure religieuse respectée, et Grace fait partie d’une fratrie de quatre enfants avec ses frères et sœur Eunice, Atara et Eliel Kutino. Cette éducation européenne, combinée à ses racines congolaises, lui a donné une perspective unique sur les défis auxquels fait face la jeunesse de son pays natal.
Une ascension spirituelle précoce
Le parcours spiritual de Grace Kutino a commencé très tôt. Selon ses témoignages, elle aurait reçu un appel divin à l’âge de 7 ans, ce qui explique son engagement précoce dans le ministère. En 2017, à l’âge présumé de 17 ans, elle a été consacrée pasteure à l’église Armée de Victoire à Paris, une cérémonie qui a suscité des débats en raison de son jeune âge et de son statut de célibataire à l’époque.
Depuis mai 2023, elle occupe le poste de présidente de Youth for Christ au sein de l’église Armée de Victoire en RDC, renforçant ainsi ses liens avec la jeunesse congolaise. Cette position lui a permis de développer une expertise dans l’encadrement des jeunes et de comprendre leurs préoccupations principales.
Un profil multifacette
Grace Kutino se présente comme une femme aux multiples casquettes : pasteure, femme d’affaires, coach, conférencière et compositrice. Cette diversité de compétences reflète une approche moderne du leadership, mêlant spiritualité et entrepreneuriat. Elle a notamment organisé des campagnes d’encouragement pour inciter les jeunes à participer aux élections de 2023 qui ont reconduit Tshisekedi au pouvoir.
Une nomination stratégique
Cette nomination s’inscrit dans la continuité des remaniements gouvernementaux orchestrés par le président Tshisekedi pour renouveler son équipe dirigeante. Le nouveau cabinet compte 53 ministres et vice-ministres, avec une représentation féminine de 32%, témoignant d’un effort d’inclusivité.
Dans sa première déclaration officielle publiée sur Facebook le 8 août 2025, la nouvelle ministre a exprimé sa gratitude au président Tshisekedi et à la Première ministre Judith Suminwa pour leur confiance. Elle a qualifié son mandat de « mission collective » et s’est engagée à servir les jeunes congolais avec « honneur, lucidité et loyauté ». Citant le Psaume 138:2, elle a présenté sa mission comme étant guidée par la foi.
Des réactions contrastées
La nomination de Grace Kutino a provoqué des réactions mitigées à travers le pays. D’un côté, les communautés chrétiennes ont largement salué cette désignation, y voyant un symbole de foi, d’intégrité et de résilience. Cette décision intervient d’ailleurs alors que la Première ministre Judith Suminwa sollicite le soutien de l’église catholique pour ses réformes gouvernementales, illustrant l’importance croissante des leaders religieux dans la gouvernance congolaise.
Les supporters de Grace Kutino mettent en avant son travail exemplaire d’encadrement de la jeunesse et son engagement civique. Ils soulignent notamment son initiative d’offrir une jeep à sa mère comme symbole de reconnaissance familiale, geste qui a été largement médiatisé et apprécié.
D’un autre côté, des voix critiques s’élèvent sur les réseaux sociaux, questionnant son expérience politique limitée et sa capacité à gérer les défis complexes auxquels fait face la jeunesse congolaise. Ces défis incluent notamment le chômage endémique, l’accès limité à l’éducation de qualité, et le manque d’opportunités économiques dans un pays où plus de 60% de la population a moins de 25 ans.
Un défi de taille
Grace Kutino hérite d’un ministère crucial dans un contexte particulièrement difficile. La jeunesse congolaise fait face à des défis multiples : un taux de chômage élevé, un système éducatif défaillant, et des perspectives d’avenir limitées. Dans ses déclarations, elle s’est engagée à être « une voix, une main tendue, un pont » pour cette jeunesse, promettant de travailler de manière collaborative pour adresser ces problématiques structurelles.
Son succès dépendra largement de sa capacité à transformer son influence spirituelle et motivationnelle en politiques publiques concrètes et efficaces. Les attentes sont énormes, et les jeunes congolais espèrent qu’elle saura représenter leurs intérêts au plus haut niveau de l’État, non seulement à Kinshasa mais aussi dans les provinces où les besoins sont souvent encore plus criants.