Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo, fait face à une crise de l’eau caractérisée par une eau à la fois rare et impropre à la consommation. Cette situation préoccupe au plus haut point les habitants de la ville, dont la vie quotidienne et la santé dépendent d’un approvisionnement régulier en eau potable. Le présent article explore les causes de cette crise et propose des solutions pour garantir durablement l’accès à l’eau dans la région.
I. L’eau rare à Kinshasa
Trouver de l’eau relève du parcours du combattant pour une majorité des Kinois. Dans certains quartiers, comme à Selembao en périphérie de la ville, les habitants doivent parcourir chaque jour des kilomètres à pied le long de sentiers escarpés et dangereux pour s’approvisionner aux points d’eau communautaires.
Pour aller chercher de l’eau, Ariette Oto, mère de cinq enfants résidant dans un quartier périphérique de Kinshasa, emprunte un sentier sinueux et escarpé jusqu’en haut d’un ravin.
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Les pénuries d’eau touchent particulièrement les zones reculées de la capitale, où moins de 1% des foyers sont raccordés au réseau de la Regideso, la société nationale de distribution d’eau, selon un rapport de l’hotel de ville de Kinshasa.
Pourtant, la République démocratique du Congo ne manque pas de ressources en eau, avec un réseau hydrographique parmi les plus développés au monde. Mais la croissance démographique rapide de Kinshasa a largement dépassé la capacité des infrastructures à suivre la demande. Résultat, la proportion des ménages ayant accès à l’eau courante est passée de plus de 90% en 2014 à seulement 72% en 2018 d’après la Banque mondiale.
II. L’eau sale à Kinshasa
Outre sa rareté, l’eau disponible à Kinshasa souffre également de problèmes de qualité. Plus de la moitié de l’eau distribuée par la Regideso serait contaminée par la bactérie E. coli, selon l’ONU.
Cette eau insalubre a de lourdes conséquences sur la santé des Kinois, entraînant des maladies hydriques et des épidémies. La typhoïde, les dysenteries et le choléra sont monnaie courante. Rien qu’en 2020, Kinshasa a connu une flambée de plus de 22 000 cas de choléra.
« C’est de l’eau sale. Il y a des amibes », explique Pierre Mafula, 56 ans, qui s’est installé à Selembao. « C’est de l’eau sale. Il y a des amibes », dit-il.
Tableau 1. Maladies d’origine hydrique à Kinshasa
Maladie | Nombre de cas en 2020 |
---|---|
Choléra | 22 481 |
Typhoïde | 3 568 |
Dysenterie | 1 785 |
La pollution de l’eau provient de multiples sources, notamment le déversement des eaux usées et des déchets industriels dans les cours d’eau. De plus, l’état délabré du réseau de distribution d’eau favorise les fuites et les infiltrations.
III. Les causes de la crise de l’eau
Cette double crise de l’eau rare et sale à Kinshasa résulte de la conjugaison de plusieurs facteurs.
Tout d’abord, la croissance démographique galopante de Kinshasa dépasse largement la capacité des infrastructures existantes. De moins de 500 000 habitants en 1960, la ville en compte aujourd’hui près de 15 millions.
Selon des experts, les pénuries d’eau sont dues à la croissance rapide de la population et à l’incapacité des pouvoirs publics de suivre le rythme.
L’urbanisation anarchique aggrave la donne, avec des constructions sauvages qui endommagent les canalisations d’eau. S’ajoute à cela la mauvaise gestion et l’insuffisance des investissements dans l’entretien du réseau par la Regideso.
Sur le plan environnemental, l’érosion des sols due à la déforestation accélère l’envasement des cours d’eau. La pollution par les activités minières, brassicoles et domestiques dégrade aussi la qualité de l’eau.
Enfin, la pauvreté touche près des deux tiers des Kinois, qui n’ont pas les moyens de s’approvisionner en eau potable en quantité suffisante.
IV. Les solutions possibles
Pour résoudre cette crise, des solutions à court et long terme doivent être mises en œuvre de manière coordonnée par les pouvoirs publics, la Regideso, les ONG et les partenaires internationaux.
À court terme, il est impératif d’assurer un approvisionnement d’urgence en eau potable aux populations, par camions-citernes et distribution de filtres individuels par exemple. Le traitement et la réparation des infrastructures défaillantes sont aussi cruciaux.
Mais les véritables solutions résident dans la planification sur le long terme:
- Renforcer la production et le traitement de l’eau par de nouvelles usines utilisant les dernières technologies.
- Étendre le réseau de distribution pour desservir les quartiers non raccordés.
- Mettre en place une gestion intégrée des ressources en eau incluant la protection des bassins versants.
- Lutter contre la pollution grâce à des systèmes d’assainissement des eaux usées.
- Instaurer une gouvernance participative faisant dialoguer tous les acteurs de l’eau.
- Obtenir l’aide de la coopération internationale pour financer ces infrastructures.
Seule une telle approche globale et concertée permettra de garantir durablement l’accès à l’eau dans la région de Kinshasa.
Conclusion
L’eau insalubre et difficile d’accès à Kinshasa met en péril la santé et le bien-être quotidien des habitants. Résorber cette crise exige des solutions d’urgence à court terme ainsi que la mise en place d’infrastructures modernes et d’une gestion intégrée des ressources sur le long terme. Une action coordonnée de l’ensemble des parties prenantes, appuyée par l’aide internationale, est indispensable pour relever ce défi et assurer enfin à la population de Kinshasa son droit fondamental à l’eau potable.